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Mise à jour le  :   20-02-2016

 

Mont Canigou Des Pyrénées, vu de Marseille, à 75 lieues

Article paru dans la presse en 1836

 

Baron ZachL’auteur de la Correspondance astronomique, M. le baron Zach, mort il y a cinq ou six ans, avait toujours entendu répéter par les habitants de Marseille que de cette ville on pouvait apercevoir le mont Canigou, situé dans les Pyrénées, à la distance de 75 lieues. Quoique cette montagne n’ait que 1431 toises de hauteur, elle peut mathématiquement apparaître en effet au dessus de l’horizon de Marseille ; car la courbure de la terre, sur une distance de 75 lieues, n’est point assez forte pour intercepter le sommet.

Connaissant par la carte les positions respectives de Marseille et du mont Canigou, il était facile de déterminer par le calcul le point de l’horizon où il fallait chercher la montagne ; mais cela ne suffisait pas : il fallait encore découvrir quelles étaient les circonstances favorables pour l’apparition du phénomène. Laissons parler ici M. de Zach.

‘’ Tous les voyageurs qui ont monté sur le Canigou assurent que l’air y est très sec et très pur, et que sont sommet est généralement au-dessus  des brouillards et des nuages.

Comme le climat du Midi de la France est presque toujours beau et très serein, et que néanmoins il es fort rare de voir cette montagne, j’ai pensé que la cause en devait être tout autre que l’obscurité, les vapeurs et l’opacité de l’air. Cette réflexion ma conduit à l’idée que peut-être la montagne ne se montrait bien distinctement que lorsque le soleil se couchait derrière elle, et qu’alors elle se projetait, pour ainsi dire, en silhouette sur le fond doré du ciel crépusculaire. Il fallait donc calculer à quelle époque le soleil, vu de Marseille, se coucherait précisément derrière le Canigou. Le résultat montra que ce phénomène devait avoir lieu vers le commencement du mois de février, et vers la fin du mois de novembre.

‘’ L’an 1808, j’étais à Marseille ; le jour du 8 février fut remarquablement beau et serein. Je me transportai dans l’après midi, avec mes instrumens (sic), sur la montagne de Notre-Dame de la Garde. Plusieurs savans (sic) et des amateurs m’accompagnèrent pour être témoins de l’expérience.

‘’ Après avoir pointé ma lunette sur le point de l’horizon où devait se trouver le Canigou, nous ne vîmes rien d’abord.

Le soleil donnait droit dans la lunette, et devait par conséquent empêcher toute vision distincte des objets terrestres, soit des instrumens (sic) d’optique, soit à la vue simple. Ce n’était qu’après le coucher du soleil que le spectacle devait avoir lieu.

‘’ Cet astre s’approchant de l’horizon, nous attendîmes avec impatience son coucher. A peine le dernier rayon avait-il disparu, que, comme par un coup de baguette, nous vîmes, pour ainsi dire, tomber à l’instant le rideau, et une chaîne de montagnes noires comme jais, avec deux pics élevés, vinrent au point nommé frapper nos regards avec tant d’évidence et de clarté, que plusieurs spectateurs eurent peine à croire que ce fussent les Pyrénées. On les aurait prises pour des montagnes du voisinage, tant elles paraissaient distinctes et proches de nous. Tandis que nos spectateurs s’émerveillaient, faisaient leurs réflexions, et étaient occupés à tracer le dessin des contours et des pics de ces montagnes, je me dépêchai d’observer ces pics ; et balayant l’horizon avec ma lunette, je découvris au nord le sommet du Ventoux, près de Carpentras, lorsque la nuit tombante mit fin à toutes mes observations.’’